Article du CRI des Travailleurs n°20

Lettre ouverte aux militants du Parti des Travailleurs (PT)

La « lettre ouverte aux militants du PT » que nous publions ci-dessous provient du site Lutte de classe (http://www.meltl.com/), animé par Jean-Claude Tardieu, militant communiste révolutionnaire qui vit aujourd’hui en Inde et qui a pris contact avec le Groupe CRI au mois d’août dernier. Les nombreuses et fondamentales convergences politiques qui se manifestent entre nous mettent à l’ordre du jour la discussion la plus prometteuse malgré la distance géographique et la difficulté d’agir en commun. Nous invitons nos lecteurs à consulter régulièrement le site Lutte de classe, qui est d’une très grande richesse politique et suit de très près les événements de France.

« Vous avez sans doute suivi comme nous les travaux de la Convention nationale du 16 octobre 2005 à Paris.

Vous avez sans doute pris connaissance des conclusions et des initiatives qui ont été prises à l’issue de cette Convention nationale.

Parmi ces initiatives, vous avez sans doute sous les yeux la « Lettre au Premier ministre adoptée par la Convention  nationale » intitulée : « Monsieur le Premier ministre nous vous demandons de nous recevoir ».

Quel est l’objet de cette demande de rendez-vous ?

Il est écrit dans cette lettre que :

« Réunis dans cette convention nationale, nous avons décidé de nous adresser à vous, parce que, dans une situation aussi terrible, il faut trouver des solutions et qu’il n’est pas possible que des choses aussi dramatiques se poursuivent. »

Nous devons avouer que nous avons été stupéfaits en lisant ces lignes : comment est-il possible que le Parti des travailleurs, associé à cette initiative, puisse demander au Premier ministre de Villepin « de trouver des solutions » à la situation catastrophique qu’il a lui-même contribué à créer ? Pire : le Parti des travailleurs ne se propose-t-il pas d’aider le gouvernement à « trouver des solutions » ? La formulation « il faut trouver des solutions » peut le laisser entendre, mais nous n’irons pas jusque-là.

On ne comprend pas.

Quatre questions nous sont venues immédiatement à l’esprit :

Comment peut-on demander au gouvernement Chirac – de Villepin « de trouver des solutions », alors qu’il est lui-même le chef d’orchestre de tous les coups terribles portés contre les travailleurs et la jeunesse de ce pays ? S’agit-il de lui demander de nous redonner d’une main ce qu’il nous a pris de l’autre ? Est-il concevable de prétendre que Chirac, le Premier ministre et son gouvernement auraient agi « involontairement ou inconsciemment », qu’ils ne sauraient pas ce qu’ils font ?

Comment peut-on demander au gouvernement Chirac – de Villepin « de trouver des solutions », alors que nous les connaissons tous « leurs solutions » : la destruction de la Sécurité sociale, du système de retraites par répartition, la liquidation de l’Éducation nationale, des services publics, des HLM, du Code du travail, etc. ?

Comment peut-on encore demander au gouvernement « de trouver des solutions », alors qu’il est resté sourd aux résultats des élections qui ont eu lieu en 2004, les cantonales, les régionales et les européennes, aux nombreuses manifestations qui ont eu lieu depuis le printemps 2003 jusqu’à celles du 4 octobre 2005, sans oublier le résultat sans appel du référendum du 29 mai 2005 ?

Le secrétaire national du Parti des travailleurs, Daniel Gluckstein, a-t-il été mandaté par les militants du PT pour demander au gouvernement Chirac – de Villepin «  de trouver des solutions » aux problèmes graves auxquels sont confrontés quotidiennement les travailleurs, les jeunes et l’immense majorité de la population ? Ou au contraire, a-t-il été mandaté pour combattre les illusions que les travailleurs pourraient encore avoir dans ce gouvernement, en ne leur laissant entrevoir aucune issue du côté de Chirac – de Villepin ?

Ces quatre questions sont à relier au contexte politique issu du référendum du 29 mai 2005 sur le Traité européen constitutionnel :

La victoire massive du non au référendum du 29 mai 2005 n’a-t-elle pas mis en évidence que Chirac et son gouvernement étaient minoritaires dans le pays et illégitimes ?

La victoire massive du non n’a-t-elle pas mis en évidence que l’Assemblée nationale était illégitime, son écrasante majorité de députés ayant voté oui à ce référendum ?

La victoire massive du non n’a-t-elle pas mis en évidence que les travailleurs à leur écrasante majorité exigeaient une autre politique conforme à leurs intérêts, que le gouvernement Chirac – de Villepin ne serait mettre en œuvre ?

Dans ces conditions-là, nous rejetons et nous condamnons cette initiative qui ne peut que nourrir les illusions des travailleurs dans le gouvernement Chirac – de Villepin.

S’il fallait l’interpréter dans le cadre de la situation politique actuelle, sans rechercher à tout prix la polémique, nous dirions qu’elle est une tentative de redonner une légitimité au gouvernement Chirac – de Villepin, alors que les travailleurs ont manifesté clairement qu’ils n’attendaient rien de ce gouvernement.

Question : Peut-on prétendre d’un côté, mener un combat efficace contre le gouvernement, tout en entretenant des illusions sur ce gouvernement, d’un autre côté ? C’est la question que nous vous posons ?

Ceci n’est-il pas à rapprocher du fait qu’à aucun moment le Parti des travailleurs ne dit nettement :

À bas le gouvernement Chirac – de Villepin, il est illégitime !

À bas l’Assemblée nationale, elle est illégitime !

Avec nos salutations internationalistes.

Le 1er octobre 2005. »