Le CRI des Travailleurs
n°31
(mars-avril 2008)

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Bulletin « Résistons ensemble contre les violences policières » n°62 (mars 2008)


Auteur(s) :Réseau « Résistons ensemble »
Date :15 mars 2008
Mot(s)-clé(s) :solidarité-militante
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Pour l’information de ses lecteurs et par solidarité militante, Le CRI des travailleurs a décidé d’intégrer désormais régulièrement dans ses colonnes le bulletin Résistons ensemble, édité par un réseau militant contre la répression et les violences policières. Ce bulletin étant mensuel, alors que notre journal est bimestriel, nous n’en reproduisons qu’un numéro sur deux. Tous les numéros sont sur  le site http://resistons.lautre.net

« Rupture » oui... mais « tranquille »

Tout le monde ou presque s’accorde maintenant à considérer qu’avec Sarkozy c’est vraiment pas comme avant, qu’il y a une sorte de « rupture ». Les « démocrates » genre Royal, Bayrou, Villepin etc, alertés par sa tentative de contournement du Conseil Constitutionnel pour maintenir la rétroactivité de la loi sur la rétention de sûreté et son style jugé indigne d’un « Président de la République », accusent Sarkozy d’installer une « monarchie élective » et appellent à la « vigilance républicaine ». Mais il y a bien plus grave que la magouille autour du conseil constitutionnel, c’est la loi de sûreté perpétuelle elle-même, c’est encore l’occupation policière massive des quartiers populaires comme à Villiers-le-bel, ou la prise d’assaut d’un foyer de travailleurs immigrés dans Paris 13e… avec ces manœuvres il se tourne vers le « peuple » vers les « victimes », « moi je vous défendrai contre les violeurs, contre la racaille » leur dit-il ; face aux immigrés, aux grévistes, aux « gauchistes » il s’exclame : « Voilà l’ennemi ! oubliez les prix qui grimpent, la fermeture des usines… fixez-moi dans les yeux, d’homme à homme, je suis votre sauveur ! ». Sarkozy a un plan, d’agression en agression, il veut démontrer que pour défendre « l’ordre » il faut un changement de régime, une dictature à la main forte, la sienne. Et dans l’exécution de ce plan, pour l’instant, il réussit : si sa stature de président et l’efficacité de sa politique économique et sociale sont massivement remises en cause, il peut toujours s’appuyer sur sa politique en matière de sécurité, qui fait encore illusion auprès de « l’opinion publique ». Et si les « démocrates » se taisent, c’est que sur ce point ce sont eux qui ont préparé la « rupture » qu’il incarne. Dans cet état de fait, il ne faut pas rire, ni pleurer, il faut comprendre. Pour pouvoir agir. Et ici et là ça commence.

Exhibitionnisme étatique

Villiers-le-Bel, le 18 février au matin quelque 1100 flics étaient de sortie, en représailles des actes de révolte qui ont suivi la mort de Moushin et Larami, deux adolescents en mini moto percutés par une voiture de police en novembre dernier. En fait, perquisitions et interpellations se sont basées sur des témoignages sous X récoltés suite à une campagne de délation rémunérée, près de la moitié seront relâchés sans poursuite après la garde-à-vue. RAID, répression du banditisme, BRI (l’ancien anti-gang)… étaient présents sans oublier les médias. « Mettez les moyens que vous voulez, mais vous les retrouvez » réclamait Sarkozy. Et le ministre de l’intérieur Alliot-Marie de nous expliquer qu’il faut « saturer le terrain », à comprendre dans tous les sens du terme.

D’une part en affichant une force de frappe avec la volonté de faire peur aux révoltés de toutes sortes, les nouvelles technologies sont étalées au grand jour et les lois durcies au fil des années trouvent leur application, fichage ADN, témoignage sous X, qualification de bande organisée. L’État possède son arsenal répressif, il s’agit de l’exhiber. Mais aussi d’effrayer plus largement, alimentant le sentiment irrationnel d’insécurité, divisant la population… et là tous les amalgames sont bons, banlieue, immigration, terrorisme… D’autre part « saturer le terrain » c’est aussi déplacer l’attention, des problèmes sociaux vers la bulle sécuritaire. Quartiers dangereux ou quartiers en danger ? Chômage, mal logement, violences policières, mépris, racisme, où est l’insécurité ?

Enfin « saturer le terrain » c’est aussi saturer l’info de façon à ce qu’on oublie l’essentiel. Mais, le samedi suivant les habitants du quartier qui se sont rassemblés en souvenir de Moushin et Larami, se sont chargés de nous rappeler l’autre version, celle qu’on tente de museler. Les témoignages sont là : perquisitions violentes, humiliations, pressions de la garde-à-vue… «  Ils ont envoyé plus de 1 000 policiers pour les interpellations. Mais le juge d’instruction n’est toujours pas venu à Villiers, sur les lieux de l’accident » a déclaré un membre du collectif Vérité et justice, créé pour défendre les personnes interpellées.

Terre-aux-barbelés

Le 12/02 à 5h du matin, 400 flics avec des chiens envahissent le foyer de travailleurs migrants de la rue Terre-au-Curé (Paris 13e) frappent des résidents, défoncent les portes et du mobilier. 115 personnes sont coffrées, rapidement l’une est expulsée au Mali, une trentaine sont relâchées, beaucoup sont enfermées à Vincennes. La police agissait sur réquisition du procureur pour arrêter quelques marchands de sommeil qui loueraient leur chambre au prix fort… L’entourloupe a été vérifiée et dénoncée par les tribunaux eux-mêmes. Il s’agissait d’une rafle géante qui ne pouvait dire son nom ! Dès l’après-midi des personnes se rassemblent devant le CRA de Vincennes. Le lendemain, un gros millier de personnes (résidents, voisins, militants) marchent entre le foyer et la mairie du 13e. La semaine suivante les expulsions commencent à tomber. Puis le 26/02 au soir deux résidents doivent être expulsés par le vol Paris-Casablanca à Roissy. Un petit groupe prévient les passagers avant l’embarquement, puis dans l’avion les flics donnent un tract de la PAF de Roissy avertissant des sanctions encourues pour « entrave à la circulation d’un aéronef » (5 ans de taule et 18 000 euros d’amende). Mais des passagers refusent d’acquiescer, des CRS arrivent et en arrêtent 4, et 2 autres quittent l’avion, qui part 4 h en retard. Les deux sans-papiers sont débarqués, l’un est libéré, l’autre doit passer au TGI de Bobigny pour refus d’embarquer. Les passagers récalcitrants passeront en procès dans les prochains mois. La machine est rodée.

Ça fume toujours

La révolte des prisonniers du CRA de Vincennes continue, malgré le découragement, les tentatives de suicide, l’absence d’une mobilisation extérieure à sa mesure. La répression se durcit. Dans la nuit du 11 au 12/02 après la coupure arbitraire de la télé, 50 CRS arrivent pour écraser la protestation des sans-papiers. Matraquage collectif dans les escaliers, couloirs, chambres. Un bras et un nez cassé. Des matelas crament. Une dizaine de prisonniers se retrouvent à l’hosto (dont un suite à une décharge de Taser apprend-on 15 jours plus tard). Puis à 3h30 tout le monde dans le froid de la cour pendant la fouille des chambres. Des puces de portables disparaissent, les fils des chargeurs sont coupés, un coran est déchiré. Le 20/02 un communiqué sort par téléphone et une grève de la faim recommence. Dans la dernière semaine de février, la révolte renaît au Mesnil-Amelot, où un nouveau centre doit être construit.

L’autre prévention

Dans diverses villes des caisses de solidarité fleurissent. Mais il s’agit ici de ne pas être lésé et dans l’urgence quand la répression policière et judiciaire frappe lors de mouvements de révolte collectifs ou individuels, de dépasser les réactions ponctuelles et catastrophistes. En fait, s’organiser sur le long terme en diffusant des conseils pratiques et juridiques. Plutôt que de se structurer au niveau national (lourdeur, bureaucratie détachée des relations humaines), ces caisses tendent à se connecter horizontalement. Certaines se concentrent sur les mandats pour les prisonniers, des débats ont lieu sur l’intérêt de payer les amendes ou les frais d’avocats, et sur les bases de travail avec ces derniers.

À Lyon, l’association Témoins existe depuis quelques années, en Île-de-France le collectif Kaliméro depuis 10 mois, à Montpellier c’est Kaliméro sous le soleil, à Dijon et dans la région rennaise c’est en construction. Cette volonté de monter des outils de soutien concret aux révoltés sur des bases politiques radicales et anti-sécuritaires se développe bien heureusement. Enfin, la prévention, la vraie ! Contacts : kalimeroparis@gmail.com, kalimerosouslesoleil@no-log.org et temoinslyon@free.fr

> [ SURLEVIF ]

Dans les cœurs et sur les murs, Zoka reste présent

Montpellier, samedi 5 février, il est 5 heure et demi, nous étions 50 à 60 personnes à nous rassembler rue de Verdun, à côté du cinéma Diagonal pour rendre hommage à Jonathan. Jonathan est mort, l’année dernière, suite à une chute du toit du cinéma. Il tentait d’échapper à la police. Après un dépôt d’un bouquet de fleurs banches, le rassemblement se transforme en manifestation banderole en tête,« une enquête pour Jonathan ». Le tout a duré une heure et demi, c’est si peu et si terrible aussi. — Contact : http://zokasmb.free.fr

> [ CHRONIQUE DE L’ARBITRAIRE ]

Garde à vu précoce, à 9 ans !

Paris 18ème c’est une bagarre à l’école entre Ben Ali et Ciline, 9 ans. La police arrive, Ben Ali est mis en GAV, rien bu, rien mangé pendant 4 heures. La mère de Ben Ali raconte : « Je vis dans le 18e depuis 30 ans et sais très bien comment la police y fonctionne, c’est-à-dire de façon très particulière. Mon fils a subi un traumatisme, il a été victime d’une injustice, qui plus est dans l’enceinte de l’école. Il s’agit d’une vraie discrimination. S’il avait été question d’un petit blanc, croyez-moi, les choses se seraient passées différemment. » (source : http://www.lepost.fr/article/2008/02/20/1101663_ben-ali-9-ans-en-garde-a-vue-s-il-avait-ete-blanc-ca-aurait-ete-different.html)

Sarkozy 1er…

… réintroduit le crime de lèse-majesté. Un militant du RESF est condamné à 800 euros d’amende pour outrage pour avoir critiqué sa politique en tant que ministre de l’intérieur vis à vis des sans papiers dans ces termes : « voilà donc Vichy qui revient. Pétain a donc oublié ses chiens (...) ». Déjà en 2004 un manifestant a eu un mois de ferme pour avoir lancé « Retourne en Chine, espèce de Hongrois « , alors que « Casse-toi, pauvre con ! » c’est sans doute du beurre venant de la bouche royale. — Le copain a fait appel, affaire à suivre…

Enfin ! La France rejoint la modernité, les prisons privées arrivent

Oh que c’est beau le PPP – partenariat public-privé, on se croirait aux States. Bouygues va construire et gérer trois prisons privées. Et le contribuable va raquer un loyer annuel de 40 millions d’euros HT « en contrepartie des prestations prévues au contrat ». En même temps TF1 du même Bouygues, ramasse le fric de la télé publique. De la prison des esprits jusqu’à la prison des corps le système se referme arrosé par le profit.

Arrestations dans le 94 pour un fumigène : quelques précisions

« Le 19 janvier dernier, trois personnes sont arrêtées dans le Val-de-Marne en possession d’un fumigène «fait maison», de quelques pétards et de clous tordus… La prison pour deux des interpellés, une libération sous contrôle judiciaire pour le troisième en attente d’un procès… Nous voulons rappeler le contexte de mobilisation politique dans lequel ces arrestations ont eu lieu… Cette construction judiciaire a des objectifs évidents : isoler, diviser et faire taire... Solidarité avec les camarades incarcérés, fermeture des prisons et des centres de rétention ». — Voir http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=94855

John Maïna, un jeune Kenyan de 19 ans s’est pendu…

… à Meudon le vendredi 15 février. Il venait juste d’apprendre le rejet définitif de sa demande d’asile. Il avait fui le Kenya il y a deux ans parce qu’il « était condamné à mort », se retrouver entre les mains de ses bourreaux cela lui est insupportable. Voilà la justice du « pays des droits de l’homme » en action. Contact : Csp92@wanadoo.fr

Inauguration en grande pompe

Excusez du peu, mais à Argenteuil, on voit les choses en grand. Après les destructions de quartiers au centre ville et de tour HLM à la ZUP, le gazage de SDF et le projet de réhabilitation de la peine de mort avec ces potos de l’UMP, le député maire d’Argenteuil, Motron, a inauguré le nouveau comico en présence d’une dame qui ne déserre jamais sa mâchoire, Alliot-Marie et du premier ministre François Fillon. Et pour la méga fiesta partie au comico, le maire, juste pour ne pas se faire déranger pendant la sauterie, a demandé que 200 CRS, policiers en uniforme, en civil, et je ne sais quoi d’autre bloquent tout le centre ville. Impossible de circuler, et toujours arrêté par les schmits qui vous guident loin du centre. Merci M. Motron, michton un jour, michton toujours…

Contre toutes les prisons !

Le vendredi 25 janvier, à la nouvelle prison pour mineurs, appelée pudiquement EPM (Établissement Pénitentiaire pour Mineurs) à Meyzieu, dans la banlieue de Lyon, un jeune détenu met le feu à sa cellule, en transformant son tee-shirt en torche pour le jeter dans la cour. Malgré ce sérieux appel au secours et malgré les avertissements d’éducateurs extérieurs indiquant clairement que la place de ce jeune n’était pas en prison, la juge des enfants a décidé récemment de prolonger encore son emprisonnement. Huit jours plus tard, Julien, 16 ans, est retrouvé mort, pendu au système d’aération de sa cellule… — Voir http://rebellyon.info/article4928.html

> [ AGIR ]

Aux Amandiers…

Lui c’est un jeune du quartier des Amandiers (Paris 20ème), où est mort Lamine Dieng dans un fourgon de police, le 17 juin 2007. La police continue à « s’occuper » du quartier. Le 20 février un contrôle d’identité. Lui, il filme la scène. Cinq jours après, assis tranquillement dans un café, une équipe de police rentre dans le café, contrôle d’identité, menottage, « tu nous as insulté », poussé dans la voiture de police, coup de poing des policiers au lèvres et au ventre (2 jours d’ITT), 24 heures de GAV, accusation d’outrage et rébellion. Procès le jeudi 27 mars à 9h, 29e chambre, métro Cité. Solidarité ! Soyons présents !

Violences policières à Rouen

Chloé est témoin de violences policières… Un des policiers la frappe avec sa tonfa (bâton de défense). Par la suite, Chloé est plaquée au sol au milieu de la rue par le même policier et sa tête frappe le sol. Vincent et Carine sont témoins et tentent de s’interposer. Carine est menottée et interpellée. Vincent est emmené derrière une porte cochère, où il se fait frapper au visage sans raison puis menotter et interpeller. Nadège, elle aussi témoin de cette scène, est repoussée brutalement. Plusieurs personnes sont gazées… Le Collectif pour la Défense des libertés Fondamentale cherche des témoignages.

Campagne contre la biométrie : dépassons les bornes !

Une campagne nationale contre le fichage biométrique, dans les établissements scolaires et ailleurs, vient d’être lancée. Info : http://panoptique.boum.org


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